Politique familiale: le réveil suisse, enfin!

Un projet de commission du Conseil national prévoit de consacrer 770 millions par an pour offrir un rabais de 20% aux parents qui placent leurs enfants dans une structure d’accueil extra-familial

On le savait, mais ce ranking-là n’a fait que confirmer le fait que la Suisse n’a qu’une politique familiale très embryonnaire. En juin 2021, la voilà qui se classe piteusement au 38e rang sur 41 pays d’un classement établi par l’Unicef, le Fonds des Nations unies pour l’enfance. Le verdict est pour le moins sévère: «Il n’est pas acceptable que la Suisse, l’un des pays les plus riches du monde, n’en fasse pas assez pour l’accueil extra-familial des enfants. Les services proposés doivent avoir un prix abordable pour chaque parent, indépendamment du revenu et du lieu de domicile», tranche Bettina Junker, directrice générale d’Unicef Suisse.

Un peu plus d’un an plus tard, on ne peut qu’applaudir. La Commission pour la science, l’éducation et la culture (CSEC) du Conseil national a élaboré un projet qui, à l’échelle suisse où l’on ne progresse qu’à petits pas, est quasiment révolutionnaire. L’on n’y parle plus de dizaines de millions, mais de centaines de millions pour permettre aux jeunes parents de concilier famille et travail. Dix fois plus, on croit rêver!

Que s’est-il passé? Si les partis de droite (UDC et PLR) restent très sceptiques en arguant que l’accueil extra-familial des enfants doit rester du domaine des cantons, l’économie tire la sonnette d’alarme. Alors qu’il y a déjà aujourd’hui près de 130 000 postes vacants, la situation va continuer à se dégrader sur le marché du travail. Plusieurs études indiquent qu’après le départ à la retraite des baby boomers, la Suisse devra repourvoir 500 000 postes à l’horizon 2030 et même plus de 1 million en 2050. Pour relever ce défi, il est aussi illusoire qu’irréaliste politiquement de croire qu’on pourra simplement actionner le levier de l’immigration. Le principal potentiel à exploiter est celui de l’extension du temps de travail des femmes, tout en étant conscient qu’il faudra aussi accepter une légère réduction de celui des hommes pour partager les tâches domestiques.

Autre étude récente, celle menée à l’Université de Neuchâtel par le professeur émérite Claude Jeanrenaud et l’économiste Julia Macuglia. Elle a montré que la création de places d’accueil extra-familial permettait d’atteindre un double objectif social et économique: l’accès facilité des mères à la vie professionnelle et la stimulation de la croissance.

Il ne fait aucun doute que le projet de la CSEC sera édulcoré par les Chambres. Mais même s’il ne reste que la moitié de ces 770 millions de francs cités actuellement, ce sera déjà un immense progrès dans la politique familiale en Suisse. Ce sera indiscutablement le plus grand succès de la vague violette, qui a porté 42% de femmes au Conseil national en 2019 et de la Session des femmes d’octobre 2021, dont c’était l’une des principales revendications.

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